samedi, avril 19, 2008

Les « mangeurs de neige »

Quand j’entends cette expression, cela me rappelle ma mère me demandant d’arrêter de manger de la neige lorsque j’étais enfant. Ceci dit, vous avez peut-être un peu de mal à imaginer quel genre de créature se nourrit de notre manteau neigeux. Eh bien il en existe une, et sans être du « vent » c’est précisément de vent qu’il s’agit. Le Chinook est le terme utilisé par la tribu indienne du même nom pour décrire un vent chaud qui souffle en hiver sur les pentes de nos montagnes de l'ouest américain. Partant du Canada, ces vents descendent les Montagnes Rocheuses d’abord sur l'Alberta puis arrivent aux États-Unis et soufflent sur les états du Montana, Wyoming, Colorado, Dakota du Sud et Utah. Ces vents chauds ne sont pas limités au continent nord-américain ; dans les Alpes, ils sont bien connus sous le nom de Foehn, et ils existent également dans les Andes d'amérique du sud où ils sont appelés Zonda. Les Californiens ont aussi une variante de ce phénomène avec les vents de Santa Anna qui causent souvent de terribles incendies. En descendant les pentes montagneuses, ces vents se réchauffent de plus en plus, au fur et a mesure qu’ils perdent de l’altitude, signifiant pour les habitants une augmentation forte et rapide des températures. La vitesse du vent croît de la même manière et peut parfois atteindre une intensité cyclonique. Ceux qui savent observer la nature peuvent voir qu’un Chinook est en route lorsqu’ils apperçoivent des traînées de nuages assez claires qui s’accrochent aux arêtes des montagne comme si elles étaient collées sur place. Ces nuages ressemblent à des doigts fantômes dansant dans le ciel. Comment ces vents chauds se forment-ils ? C'est le résultat de précipitations sur le pan exposé de la montagne qui fait suite à un réchauffement adiabatique* de l'air sur le versant protégé, alors que la majeure partie de l’humidité vient d’être larguée sur l’autre versant. À la suite de ces différents taux adiabatiques entre air humide et air sec, les masses d'air situées sur les versants protégés deviennent plus chaudes que sur les altitudes équivalentes des pentes exposées. Les vents de Chinook ou de Foehn peuvent alors faire monter les températures de l'ordre de 30 ° C juste en quelques heures. Ces vents sont précisément appelés « mangeurs de neige » car ils sont capables de faire fondre la neige - le plus souvent par sublimation - de manière extrêmement rapide. Quand la neige était encore une malédiction plutôt que l'or blanc qu’elle est devenue aujourd'hui, les vieux Hauts-Savoyards disaient qu' « une journée de Foehn fait fondre autant [de neige] que deux semaines de bon soleil... » Parce que la sublimation est le principal mécanisme en cause, ce processus n'est pas seulement basé sur une température élevée, mais aussi sur une humidité relative très basse. Pour couronner le tout, Chinook et Foehn auraient également des effets néfastes sur la santé et le comportement des personnes se trouvant sur leur passage, provoquant souvent des maux de tête, de l’anxiété ainsi que de l’irritation. Dès que ce temps artificiellement chaud et ensoleillé prend fin et que froid et neige sont de retour, chacun se sens immédiatement beaucoup mieux et se plaint alors du retour de l’hiver. Ça, je le savais, personne n’est jamais content...

* Changement de température alors que l’on gagne ou que l’on perd de l’altitude ; the taux normal de changement est en moyenne de 0.65 degrés Centigrades par 100 mètres.

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